JOURNEES DES METIERS D’ART- LE ROSEAU D’OLLIOULES FAIT VIBRER LES ANCHES JUSQU’EN CHINE

Ce week-end, dans le cadre des Journées Européennes des Métiers d’Art, la Ville d’Ollioules met à l’honneur ses propres artisans d’art. Depuis fort longtemps ils sont au nombre d’une trentaine, installés dans l’excellence au cœur de la cité. Et parmi ces créateurs au savoir faire unique, on compte MARCA (Manufacture d’Anches et roseau de la Côte d’Azur) mondialement connue pour la qualité exceptionnelle de ses roseaux et de ses anches, sans lesquels les instruments à vent seraient privés de son.

Du 5 au 7 avril, Ollioules va vivre à l’heure des Métiers d’art, une spécificité qu’elle n’a cessé d’encourager depuis près de trente ans. De l’horlogerie à la lutherie, de la joaillerie au vitrail, à la céramique, en passant par la sculpture, la peinture, la photographie, la couture, le mobilier d’art, la ferronnerie, la tapisserie…, le centre médiéval de la commune affiche le nec plus ultra de ce qui se fait en matière d’art. Au point qu’a été créé un circuit des métiers d’art, devenu « Le Chemin des Créateurs » avec pour parrain Charles Berling, l’acteur bien connu, directeur de Châteauvallon Scène nationale et du Liberté Scène Nationale.

Une entreprise familiale née en 1957

Dans ce circuit figure une véritable institution, la Manufacture d’anches connue sur tous continents du globe pour la qualité exceptionnelle de ses anches pour clarinette et saxophone, ce qui en fait l’un des principaux leaders mondiaux dans sa catégorie.

Située à l’entrée d’Ollioules, cette entreprise familiale a été créée en 1957 par la famille Guccini. Et le choix de son emplacement n’est pas dû au hasard : car si Ollioules est connue pour ses oliviers (d’où d’ailleurs son emblème) et son horticulture, elle abrite aussi une denrée rare, la canne sauvage de Provences qui ne pousse que là. Cette dernière permet d’obtenir des anches d’une qualité exceptionnelle, indispensables aux clarinettes, saxophones, hautbois et autres bassons.

Des produits exportés dans 70 pays

« Mais la fabrication d’anches nécessite un grand savoir faire même si aujourd’hui le semi automatisme permet d’alléger les tâches » explique Nicolas Righi, le patron de l’entreprise familiale qui occupe 13 personnes et qui ne cesse de se développer au point d’exporter ses produits dans 70 pays dont la Chine, le Japon, les USA, l’Amérique du sud, soit plus de 2 millions d’anches par an avec une production principalement destinée à l’univers des saxophones et des clarinettes.

Le produit est tellement apprécié que parmi ses plus fidèles clients on compte Sidney Bechet, Teve Lacy, Jimmy Sax, Alonzo Wright (musicien de jazz à New-York et tant d’autres …

Quatre ans pour créer l’indispensable bout de musique

Entre la pousse du roseau et le produit fini, il s’écoule quatre années. Avant d’être transformés en un petit bout de quelques grammes capable de faire vibrer ces instruments, les roseaux sont récoltés au bout de deux ans en hiver ; ils vont ensuite sécher pendant un an dans un hangar, stockés sur des tréteaux à l’air libre pour être préparés à la taille et acquérir leur couleur jaune, puis découpés dans des machines et calibrés. La finition se fait alors manuellement, au millimètre près avant l’empaquetage et expédition aux quatre coins du monde.

Mais l’entreprise a connu des moments difficiles, d’abord à cause du Covid où elle a dû accuser une perte de 70% ! Ensuite à cause d’une directive européenne, la Loi GEMAPI (Gestion des Milieux Aquatiques et Prévention des Inondations) qui renforce l’aménagement des bassins versants, celui de l’entretien et l’aménagement des cours d’eau, la défense contre les inondations, la protection des zones humides…

Faire face à des contraintes législatives

Or, l’entreprise MARCA est concernée par cette Loi car ses roseaux sauvages, uniques dans le Var, se trouvent à proximité de la Reppe, petit fleuve côtier à sec la plupart du temps mais, de temps en temps en colère. Ce qui veut dire que la superficie des fameuses roselières a été rétrécie.

« Dès lors, nous sommes à la recherche de terrains pour y planter des roseaux » explique Nicolas Righi qui ajoute « Ce ne serait plus la même qualité ; Alors, pour rester au top, nous avons décidé d’innover et de créer un système qui permettra de stabiliser les anches et en obtenir la qualité originelle ».

Quoi qu’il en soit, à chaque instant dans le monde on célèbre de la musique classique ou du jazz. Et, forcément, avec petit bout de roseau d’Ollioules transformé en magie par du savoir faire, pour faire vivre Mozart, Beethoven et tous les autres..

François Kibler