CAP SUR RICHERENCHES, CAPITALE DE LA TRUFFE

Avant d’être un beau village provençal, Richerenches fut une Commanderie templière (parfaitement conservée), mais en plein cœur du Vaucluse, c’est aussi la capitale de la truffe qui fête cette année son centième anniversaire. Matriochka ne pouvait pas manquer un tel événement. Samedi 17 février 2024 cap donc sur ce joyau de la Provence et son trésor. Récit

Après trois heures de route en autobus affrété par la Mairie de Six-Fours et avoir traversé les beaux paysages vauclusiens, nous voici dans la Drôme : le Mont Ventoux se dresse au loin côté droit de notre route. Nous passons par le village de Suze la Rousse, fièrement dominé par son château du 12ème siècle qui abrite aujourd’hui l’Université du vin : une idée pour une prochaine excursion de Matriochka dans la région.

La capitale de la truffe

Enfin voici Richerenches, au sein de l’enclave des Papes : nous repassons ainsi dans un petit morceau du Vaucluse, enchâssé dans la Drôme. C’est à la Révolution française que les habitants de cette partie de l’ancien Comtat Venaissin ont demandé à devenir vauclusiens et non drômois.

Notre matinée va être consacrée au marché aux truffes qui fête cette année son centième anniversaire et à la visite guidée de la Commanderie templière, en compagnie de notre guide local, Françoise Richez.

Chaque année, de mi-novembre à mi-mars, tous les samedis matin, sont vendues les fameuses « rabasses » (nom provençal de la truffe), récoltées dans la région, dont la fameuse « tuber melanosporum ». C’est le marché le plus important en Europe !

Sans oublier d’autres produits du terroir

Une allée est destinée aux particuliers : vente de truffes bien sûr mais aussi tous les bons produits du terroir : miel, olives, fruits, eaux florales, nougat, vin…Chacun d’entre nous sent, furette, trouve de quoi se faire plaisir ou faire des cadeaux.

Nous découvrons ensuite avec Françoise l’allée Frédéric Mistral, bordée de platanes majestueux, consacrée aux négoces entre grossistes et trufficulteurs : tout se passe devant les coffres des voitures blanches : le diamant noir est inspecté, pesé, évalué, vendu.

Sa commanderie templière la mieux conservée de Provence

Vers 11h45 Françoise nous accompagne vers la Commanderie des Templiers : en 1136 un seigneur local, Hugues de Bourbouton, a fait don de terres à l’ordre du temple pour permettre sa construction; Hugues en deviendra lui-même  commandeur quelques années plus tard.

La commanderie, achevée en 1147, comportait l’église et la maison templière à deux étages, le niveau inférieur pour les animaux, le niveau supérieur pour les frères. A la fin du 12ème siècle L’édifice fut fortifié et l’étage couvert d’une voute en berceau brisé, rythmé de doubleaux. Son activité était dédiée à l’agriculture et en particulier à l’élevage de chevaux de combat. En 1314 la commanderie passe aux mains des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem après l’abolition de l’ordre du temple puis en 1317 devient propriété du St Siège. Les bâtiments ont subi d’importantes transformations au cours des siècles, en particulier au 18ème siècle : cloisonnements, construction de la maison des notaires. C’est l’édification de cette Commanderie qui est à l’origine du développement du village

Saint Antoine, patron de trufficulteurs

Nous nous rendons à l’église St Denis reconstruite au 16ème siècle (au passage nous pouvons voir le puits templier). Nous découvrons à l’intérieur une pierre gravée du nom d’Hugues de Bourbouton retrouvée enchâssée en partie basse dans la maçonnerie du chevet.

Chaque 3ème dimanche de janvier y est célébrée la messe sous le patronage de St Antoine, patron des trufficulteurs.

Après avoir admiré la tour de l’horloge et la maison des notaires, nous voici au musée de la truffe et du vin dans les caves de la maison templière ; beaucoup de monde pour découvrir les secrets de ces deux types de culture et leurs outils. Saviez-vous que l’absence d’herbe au pied du chêne indique la présence de truffes

Une bonne omelette aux truffes

Enfin nous découvrons la majestueuse salle voutée de la maison templière, haute de 32 m et véritable donjon médiéval !! On se sent tout petit sous ces arcs « en doubleaux ».

Toutes ces découvertes olfactives et visuelles nous ont ouvert l’appétit : aussi Françoise nous accompagne-t-elle à la salle où nous attend un repas bien mérité, et en particulier l’omelette aux truffes accompagnées d’un bon vin des Côtes du Rhône.

Un bon café conclut ce moment convivial. Pendant ce temps le Mistral s’est renforcé ; Françoise, notre guide, prend congé et nous nous rendons à pied, hors les murs du village, chez un trufficulteur.

Dans les secrets du cavage

Ce dernier, jeune homme très sympathique, nous accueille avec sa chienne Rita au beau milieu des vignes et surtout de la truffière. De beaux alignements de chênes verts sont bordés de pieds de lavandes endormis pour l’hiver. Nous allons assister à une opération dite de « cavage ». Aussitôt Rita commence à renifler le sol et commence à creuser : eh oui, elle a senti quelque chose !! Son maître, armé d’une petite fourche à deux dents creuse et trouve la première truffe.

Rita ne la mange pas (les chiens ne mangent pas les truffes) mais elle est récompensée par quelques friandises canines. A notre grande joie l’opération recommence ainsi plusieurs fois.

Au fait ? Comment Rita a-t-elle été dressée au cavage ? Encore chiot, son maître l’a habituée à jouer avec une truffe enfermée dans une chaussette, puis la chaussette a été enterrée ; et c’est comme cela que Rita est devenue une découvreuse hors pair de rabasses.

Après cette démonstration, notre ami trufficulteur nous propose des truffes fraîchement cueillies, de l’huile d’olives truffée…Chacun s’empresse ainsi de compléter ses achats et dit au revoir à notre ami et à sa compagne à quatre pattes.

Après l’or noir, le nectar des Côtes du Rhône

Avant de quitter Richerenches nous décidons de faire un tour à sa cave à vin, le Cellier des Templiers, dotée d’un vignoble de 700 ha s’étendant sur deux AOP : Côtes du Rhône et Grignan-les-Adhémar.

Les derniers achats « plaisir » réalisés, nous remontons dans notre bus, rassasiés de belles images et de bonnes odeurs du terroir ; à bord, vous vous en doutez, cela sent la truffe !!!

Et c’est ainsi que se termine notre belle journée dans l’enclave des Papes, en espérant y retourner pour de nouvelles aventures vauclusiennes.

Elisabeth Puissant