Pour la 1ère fois l’hôtel de Caumont présente une exposition dédiée au peintre Pierre Bonnard. Intitulée « Bonnard et le Japon », l’exposition va nous révéler comment l’art des estampes nippones a inspiré profondément l’artiste.
C’est, guidés par Nicole de Palatinat que nous allons à la rencontre de « Bonnard le nabi très japonard »
Né en 1867, son père voulait qu’il s’oriente vers le droit. Mais Pierre Bonnard aime la nature, les animaux et dessiner. En 1893 il rencontre Marthe Boursin dite de Meligny qui deviendra sa femme et son modèle. Licencié en droit, il s’inscrit au cours Julian puis est reçu à l’école des Beaux-arts de Paris en 1899. Il va ensuite abandonner le droit et se consacrer à son art.
Nabi mais pas que… puis le japon
Avec des amis tels que Edouard Vuillard, Paul Sérusier, Maurice Denis… il va privilégier la couleur posée à plat, peindre la nature telle qu’il la voit.
Ils vont ensemble constituer le groupe des « nabis » (traduction de « prophètes » en hébreu). Toutefois Bonnard reste inclassable : « je ne suis d’aucune école » dira-t-il en 1891.
Lors de l’exposition de 1890 aux Beaux-Arts il est ravi par les estampes japonaises. Il va les collectionner et s’inspirer de l’état d’esprit des artistes nippons et de leurs techniques picturales.
Pénétrons à présent au sein de l’exposition.
Paravent, panneaux et estampes
Dès l’entrée, l’influence japonaise saute aux yeux : devant nous les panneaux d’un paravent, œuvre de Bonnard, magnifiquement mis en valeur puis des estampes japonaises des artistes Kuniyoshi et Hirochige, riches en couleurs posées à plat sans ombre ni relief.
Faisant écho à ces œuvres, 4 grands panneaux décoratifs nous font face : ce sont « les femmes au jardin », stylisées par Bonnard, colorées et ondulantes et qui pourraient représenter les 4 saisons.
Un peu plus loin Bonnard s’est lancé dans le projet d’un éventail « Femmes et fleurs ».
La vie en mouvement, les enfants et les animaux
Ayant complètement abandonné le droit, Bonnard arpente les rues parisiennes, les cabarets et saisit ce qui l’entoure : comme les japonais, il met en avant le mouvement par le jeu de vides et de pleins et s’inspire des nouvelles technologies que sont la photographie et le cinématographe.
N’ayant pas d’enfant, il aime beaucoup ses neveux et nièces. A l’instar des japonais, il réalise des œuvres intimistes de maternité et d’enfants.
Sa complicité avec les animaux place chiens et chats, en particulier, au sein de ses tableaux, comme dans les scènes illustrées de l’ukiyo (monde flottant) -e(image).
Les couleurs et lumières du midi
En 1909 Bonnard découvre la Provence. Les couleurs et la lumière du Midi le fascinent. C’est ainsi qu’il s’installera en 1926 au Cannet (il s’y éteindra en 1947).
« La conversation provençale » peinte en 1911 comme « les Baigneurs à la fin du jour » peint en 1945 juxtaposent des bandes de couleurs contrastées comme le font les estampes Japonaises.
L’instant présent
Attaché à représenter le temps, Bonnard dit en 1936 « l’œuvre d’art : un arrêt du temps ». Nous découvrons des scènes intimes, d’intérieur comme « le dessert » et « la nappe blanche ».
L’heure du tigre, geishas et nus féminins
Nous revenons plus près des Japonais en découvrant le thème de « l’heure du tigre » : il s’agit pour les asiatiques de la période du jour entre 3h et 5h du matin, moment où les maisons closes se vident de leurs clients.
Voici les célèbres Geishas si mystérieuses. Bonnard s’inspire de ces femmes d’Edo pour peindre ses « nus féminins » pour lesquels Marthe sera son principal modèle.
Eclosion des fleurs
Notre dernière étape au pays de Bonnard le Japonard nous emmène au « Hanami » ; contemplation des arbres fruitiers en fleurs. L’artiste représente la nature dans sa plus belle parure : l’éclosion des fleurs. Ainsi se révèle au travers d’une fenêtre ouverte un jardin coloré et enfin « l’amandier » : marquant en premier le retour du printemps, il donne à Bonnard « la force de peindre chaque année ».
Bonnard et le futur
Cette exposition nous a dévoilé un maître de la couleur et de la lumière, aux multiples facettes : portraitiste, affichiste, décorateur, lithographe…amoureux de la nature et du temps présent, fasciné par un pays lointain où il ne se rendit jamais !
Nicole de Palatinat nous lit cette phrase de l’artiste : « J’espère que ma peinture tiendra, sans craquelures. Je voudrais arriver devant les jeunes peintres de l’an 2000 avec des ailes de papillons ».
Belle conclusion pour ce voyage lumineux et dépaysant entre France et pays du soleil levant !!
Elisabeth Puissant