En ce début du mois de mai, partons à la découverte de la vieille ville de Fréjus, où vestiges antiques, édifices religieux et enfin personnages célèbres vont nous faire parcourir deux millénaires en une seule journée.
De Jules César à Auguste, un port sur la voie aurélienne
Ce serait sous Jules César qu’aurait été fondée la cité romaine de Forum Julii, sur la voie aurélienne en bord de mer. Sous l’empereur Auguste elle deviendra l’un des principaux ports romains, en particulier après avoir accueilli les galères prises à Marc Antoine lors de la bataille d’Actium.
A l’époque la ville s’étendait sur près de 40 ha et comptait 30000 habitants. Fortifiée, ses rues se coupaient à angle droit, et comme toute cité de l’empire digne de ce nom elle comportait un forum, un théâtre, des arènes, un aqueduc…
Aujourd’hui, après des siècles de destructions et de reconstructions, maints ouvrages ont quasiment disparu, laissant entrevoir de-ci delà des pans de murs, des fondations découvertes lors de travaux mais laissées enfouies pour les protéger de nouvelles dégradations.
Néanmoins la ville nous offre encore de beaux vestiges, témoignages du passé glorieux des Romains. Partons à leur découverte…
L’eau, les viviers et la voie aurélienne
Un morceau d’aqueduc que nous découvrons au loin nous rappelle l’ingéniosité des Romains pour acheminer l’eau dans la cité sur des dizaines de kilomètres. Notons que de la fin de l’époque romaine à la fin du XIXème siècle, la ville n’aura plus accès à l’eau courante !
Comme tout port romain, Forum Julii exploite sa faune sous-marine : pour disposer de poisson frais, la ville s’est dotée de viviers. C’est lors de la construction d’un bâtiment municipal qu’ont été découverts les viviers romains les mieux conservés à ce jour : creusés dans la roche les citernes reliées par des canaux permettent à l’eau douce et l’eau de mer de se mêler savamment pour respecter la survie des poissons. En outre Fréjus était le 1er producteur de « garum », ce jus de poisson fermenté tant apprécié des Romains.
Pour rentrer et sortir de la ville les habitants empruntaient des portes dont nous admirons aujourd’hui les vestiges : la porte des Gaules, aux murs en demi-cercle, nous dévoile un morceau de la voie aurélienne marquée par les sillons des roues. Une entrée était réservée aux véhicules et deux autres, de chaque côté, aux piétons.
Les pépites du musée archéologique
C’est au musée archéologique que nous prenons le pouls de la vie quotidienne des habitants. Du centre d’une mosaïque divinement restaurée surgit une belle panthère. Plus loin les fragments de fresques murales sur fond de rouge pompéien ont permis la reconstitution d’une salle d’habitation patricienne. Une tête en marbre supposée de Jupiter nous fait face ainsi que ce qui est devenu un peu l’emblème de la ville : l’Hermès aux deux visages en marbre de Carrare.
Enfin les objets de la vie quotidienne (amphores, jarres, poteries, miroirs…) et rites funéraires (urnes et stèles gravées) captent toute notre attention.
Le groupe épiscopal, du premier temps des Chrétiens à aujourd’hui
Vers 374 l’évêché de Fréjus est créé. Mais les invasions wisigothes, lombardes puis sarrasines vont mettre à mal la cité. Vers le début du 10ème siècle la ville va revivre grâce à l’évêque Riculphe qui fait reconstruire la cathédrale et relève la ville de ses ruines. C’est ainsi va se constituer le groupe épiscopal que l’on admire aujourd’hui. Nous en admirons les 4 éléments qui le constituent.
La Cathédrale St Léonce, composée de deux églises accolées : celle des évêques (Eglise Notre Dame) et celle des chanoines (Eglise St Etienne) reliées entre elles au 13ème siècle. Elle recèle un magnifique retable du XVème siècle dédié à Ste Marguerite.A gauche de l’entrée se découvre le baptistère paléochrétien édifié au 5ème siècle : c’est aujourd’hui le seul existant encore en France avec ceux de Riez, Poitiers et Aix en Provence.
Le cloître du 13ème siècle, accolé à la cathédrale, est renommé pour son « bestiaire » : en effet, les plafonds en caissons de bois de mélèze de ses galeries sont décorés au 14ème siècle de 1200 scènes colorées figurant des personnages religieux, la vie quotidienne des habitants mais aussi des êtres fantastiques mi humains mi bêtes dont on ignore encore la signification.
Enfin le Palais Episcopal, remanié aux 11 et 12èmes siècles, est vendu comme bien national à la révolution, rendu à l’Eglise en 1823 puis à nouveau récupéré en 1905 par la ville et abrite aujourd’hui l’Hôtel de ville.
Un abbé révolutionnaire, un empereur et un pape
Nous parcourons le temps et nous voici au 18ème siècle.
Saviez-vous que Fréjus est la ville natale de l’abbé Sieyès, rédacteur du serment du jeu de Paume en octobre 1789, directeur du Directoire en 1799 ? Sa statue de bronze nous fait face sur la place de l’office de tourisme.
En 1799 Bonaparte fait étape à Fréjus à son retour de la campagne d’Egypte.
Le pape Pie VII fait prisonnier par Napoléon séjourne dans la ville en 1809 et dormira une nuit à l’hôtel de la Poste en 1814. A son tour Napoléon déchu dormira dans la même chambre quelques mois plus tard avant de s’embarquer pour l’île d’Elbe. C’est aujourd’hui l’hôtel Arena dont nous voyons la façade rue du Général de Gaule.
C’est ainsi que nous avons parcouru près de 2000 ans d’histoire. A cause de l’ensablement la ville avait perdu définitivement son statut de port en 1774. Elle l’a retrouvé au 20ème siècle avec la construction de Port Fréjus, mais c’est la vieille ville, riche de son passé, qui a aujourd’hui émerveillé nos yeux en une si belle journée de printemps.
Elisabeth Puissant