DEPUIS 1927, LE VAR DECOR NATUREL POUR LE 7ÈME ART

La femme du boulanger (Marcel Pagnol 1938)

A l’occasion du prochain Festival de Cannes (du 14 au 25 mai 2024) beaucoup de cinéphiles ignorent que plusieurs chefs-d’œuvre du 7ème art ont été tournés dans le Var, principalement à Saint-Tropez et alentour, mais aussi à Hyères et dans l’aire toulonnaise et même dans le Haut-Var. Ces écrans naturels ont attiré les réalisateurs et autres metteurs en scène pour la beauté des sites ainsi que pour leur luminosité, à l’image de leurs prédécesseurs, les peintres.

Les premiers tours de manivelle du cinéma dans le Var ont été donnés dans l’aire toulonnaise, plus précisément à La Garde au début du siècle dernier.

Abel Gance tourne Napoléon à La Garde

C’est donc sous les rochers de La Garde qu’Abel Gance tourne en 1927 Napoléon, un film (en noir et blanc et muet mais entièrement restauré en 2008 et sonorisé), considéré par les cinéphiles comme l’un des plus grands de l’histoire du cinéma. Il retrace le parcours de Napoléon Bonaparte de son enfance à l’école de Brienne jusqu’au début de sa première campagne.

Et, depuis, de très nombreux films ont été réalisés dans le Var, notamment du côté de Saint-Tropez et de Hyères mais aussi dans l’aire toulonnaise et dans l’ouest-varois où les metteurs en scène ont été séduits par les incroyables atouts qu’offrent leurs décors naturels.

En voici quelques exemples, mais la liste est loin d’être exhaustive.

Bandol
Nos amis les flics de Bob Swaim (2004) avec Daniel Auteuil et Frédéric Diefenthal, une comédie policière bien troussée.

Six-Fours

Enfin veuve d’Isabelle Mergault avec une séquence tournée surtout à Bandol
mais aussi avec une belle prise de vue au Brusc, à Six-Fours.

Hyères

Pierrot le Fou de Jean-Luc Godard tourné en 1965 avec Jean-Paul Belmondo, Anna Karina, Raoul Coutard…Plusieurs séquences ont été tournées à Porquerolles.

Le Passager de la Pluie dû à René Clément en 1970 avec Marlène Jobert, Charles Bronson, Corinne Marchand, Annie Cordy, Jean Piat…De superbes séquences se déroulent sous les arcades de la vieille ville. Un super film policier. Ce très beau film a obtenu le Golden Globe du meilleur film en 1971.

L’une chante, l’autre pas, d’Agnès Varda en 1977 avec Valérie et Mona Mairesse, un film féministe en faveur de la contraception qui n’a eu guère d’écho.

Le Grand Bleu, ce chef-d’œuvre de Luc Besson arrivé sur les écrans en 1988 en hommage à Jacques Mayol et Enzo Maiurca incarnés par Jean Reno, Rosanna Arquette et Jean Barr. Les scènes ont été tournées au large des îles d’Hyères. Ce film, souvent diffusé par la télévision avec d’excellentes audiences, avait été très mal accueilli au Festival de Cannes dont il avait fait l’ouverture. N’en déplaise, il avait obtenu six nominations aux Oscars (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur, meilleur son).

La Seyne

En 1964, Gilles Grangier pose ses caméras à La Seyne pour tourner L’âge ingrat, une comédie dramatique avec pour principaux interprètes Jean Gabin, Fernandel, Marie Dubois, Paulette Dubost…Plusieurs séquences ont été tournées aux Sablettes et à Saint-Mandrier.

Le Petit Baigneur

En 1968 c’est l’effervescence près des chantiers navals. Robert Dhéry a choisi ce site pour y tourner un film plein d’humour, Le Petit Baigneur avec comme vedette Louis de Funès aux côtés de Michel Galabru, d’Andréa Parisy…D’autres séquences ont été réalisées sur les rives de l’Aude en face des cabanes de Fleury à Vendres. Ce film a connu un immense succès et il est régulièrement rediffusé sur les chaînes télévisées.

L’école de la vie, un film de Christophe Barraud tourné en 2007 (une série).

Mal de pierres de Nicole Garcia tourné en 2016, avec une sublime Marion Cotillard, une belle et émouvante histoire qui raconte la quête d’une jeune femme, après 1918, pour retrouver l’amour absolu. Très peu de séquences ont été réalisées à La Seyne, mais surtout à Porquerolles et au Pradet. L’essentiel cependant a été réalisé aux Sables d’Olonne, à Nantes et à La Baule.

C’est beau la vie quand on y pense de Gérard Jugnot et avec le même cette histoire émouvante aux dialogues bien écrits a été tournée en 2018 à la fois à Toulon et à La Seyne mis n’a guère connu de succès, sinon d’estime.

Le Castellet

La Femme du Boulanger.
Marcel Pagnol, sous les conseils du toulonnais Jules Raimu décide d’investir dans le cinéma. Et décide ainsi d’installer ses caméras au Castellet pour y tourner ce film culte.
Nous sommes en 1938. Pas besoin de créer un décor, il existe et il est naturel : une authentique boulangerie à l’ancienne. Ce fut le début de la trilogie des plus grands succès de Pagnol et Orson Welles jugeait Raimu comme le plus grand acteur du monde.

Mais on retiendra sûrement cette scène culte quand la femme volage revint au foyer et que son mari trompé s’adresse à son chat : « Ah Pomponette, ah te voilà de retour, garce, salope…C’est maintenant que tu reviens »

En 1998, Patrice Leconte s’entiche lui aussi du Castellet pour y réaliser Une chance sur deux réunissant trois monstres sacrés du 7ème art, Jean-Paul Belmondo, Alain Delon et Vanessa Paradis. Plusieurs scènes sont réalisées au Circuit Paul Ricard mais aussi à Antibes et à Monaco. C’est la dernière fois que Bébel accepte de se laisser suspendre à un hélicoptère en plein vol, comme, autrefois, dans le Guignolo. Et les assurances ont refusé de le couvrir. Il l’a fait quand même. Il avait 64 ans. Sacré bonhomme. Et le film connut un succès immense.

Riboux

C’est probablement la perle parmi les grands décors naturels varois qui ont contribué au succès de deux films inoubliables inspirés par marcel Pagnol.

Jean de Florette de Claude Berri réalisé en 1986 dans les environs de ce village de 35 habitants, avec Daniel Auteuil, Gérard Depardieu, Yves Montand, Elisabeth Depardieu…

Manon des Sources également tourné en 1987 par le même Claude Berri avec Emmanuelle Béart, Daniel Auteuil (à cette époque ils sont en couple), Yves Montand, Elisabeth Depardieu, Pierre-Jean Rippert, Hippolyte Girardot…
La plupart des scènes ont été réalisées à la Ferme des Romarins au lieu-dit Château Renard.
A l’heure du déjeuner, toute l’équipe se retrouvait au Solitaire, une auberge qui ne payait pas de mine mais où l’on dégustait de savoureuses grillades au feu de bois. Ce restaurant n’existe plus aujourd’hui.

Dans un prochain article, les caméras se tourneront vers Saint-Tropez et le Haut-Var, eux aussi riches en décors naturels où ont été tournés de nombreux films.

François Kibler